Samedi 11 septembre, dans l’émission On est en direct, Eric Zemmour n’a pas pu s’empêcher de mêler Napoléon Bonaparte pour justifier son idée d’interdire les prénoms « non français ». Cette interdiction fait parti des idées qu’il met régulièrement en avant lorsqu’il vient parler d’assimilation et d’immigration.
Sur les questions liées à l’immigration, à l’intégration et à l’assimilation monsieur Zemmour pose souvent les bonnes questions, apporte parfois des pistes de solution, comme en prenant exemple sur le Grand Sanhédrin de 1806 concernant l’islam, mais se permet des interprétations et des raccourcis historiques erronés ou bien vient mettre en lumière l’arbre qui cache la forêt.
Il est évident que l’assimilation doit être l’objectif que nous devons nous donner mais cet objectif ne prend tout son sens que lorsque nous serons en capacité d’accepter et de faire accepter que, comme l’écrivait Renan, « l’existence d’une nation est un plébiscite de tous les jours » et que ce plébiscite se construit par « deux choses qui, à vrai dire, n’en font qu’une. L’une est dans le passé, l’autre dans le présent. L’une est la possession en commun d’un riche legs de souvenirs ; l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis … ». Alors effectivement le choix d’un prénom est signe de cette volonté de ce désir de vivre ensemble mais est-ce que parce que je vais m’appeler Kévin, Joachim, Mohamed que je serais moins Français que Michel, Jean-Pierre ou Marcel ? Si l’on suit Renan, avant de faire du prénom l’alpha et l’oméga de l’assimilation, il faut se focaliser sur ce qui construit l’intégration qui va ensuite pouvoir amener à l’assimilation c’est-à-dire amener au respect puis à l’amour de la France et cela passe par le retour à une véritable instruction publique qui remette en avant notre Histoire et notre Culture, une véritable politique de la méritocratie qui remplace toute idée de discrimination positive, une véritable politique de l’aménagement qui vienne casser les ghettos ethniques et sociaux …
Mais revenons à cette fixation sur les prénoms que fait Eric Zemmour. Il vient s’appuyer sur la loi du 11 Germinal an XI (1er avril 1803) pour affirmer que Napoléon Bonaparte avait, par celle-ci, interdit l’usage de tous les prénoms qui ne seraient pas français, donc chrétiens. Pour enfoncer le clou, il vient dénoncer les socialistes et leur modification de la dite loi en 1993 permettant l’utilisation des prénoms musulmans entre autres.
Mais que dit exactement cette loi de 1803 dans son article premier ?
« A compter de la publication de la présente loi, les noms en usage dans les différents calendriers, et ceux des personnages connus de l’histoire ancienne, pourront seuls être reçus, comme prénoms sur les registres de l’état civil destinés à constater la naissance des enfants ; et il est interdit aux officiels publics d’en admettre aucun autre dans leurs actes »
On peut tourner le texte dans tous les sens, il n’y est nulle part fait référence à de quelconques prénoms français et encore moins uniquement chrétiens. Il est bon de se rappeler qu’en 1803 notre pays connait deux calendriers qui sont le calendrier grégorien et le calendrier révolutionnaire. Dans le premier effectivement nous trouvons les prénoms dits chrétiens mais dans le second nous pouvons trouver des références à la nature, aux saisons … Rien dans l’interprétation de la loi de 1803 n’interdit à un citoyen français de s’appeler Colchique ou bien Brumaire et encore moins Tridi. Il en est de même avec les « personnages connus de l’histoire ancienne » pour lesquels aucune origine n’est définie et qui donc permet aussi bien les César que les Sadi ou bien les Saladin en passant par les Charlemagne ou les Moise et Mahomet …
D’autre part, lorsqu’Eric Zemmour vient dénoncer le laxisme né en 1993 quant à l’acception des prénoms « étrangers » mais il oublie de parler de la circulaire du 12 avril 1966 qui vient assouplir la loi du 11 germinal, et donner un cadre « d’application pratique » au choix des prénoms, en autorisant les prénoms étrangers, les prénoms « régionaux » mais aussi les « prénoms coraniques ». Dans cette circulaire, comme aujourd’hui et comme en 1803, il est demandé aux officiers d’état civil de rejeter « les prénoms de pure fantaisie ».
Les questions de l’immigration et de l’assimilation sont primordiales pour notre pays et son avenir. Elles demandent à être traitées avec fermeté et responsabilité mais aussi avec honnêteté. Louis-Napoléon Bonaparte disait « Faire appel aux passions vulgaires de la foule, n’est pas gouverner », modestement je rajouterai que ce n’est pas non plus faire de la politique tout simplement …
Enfant du Comminges, dans les Pyrénées Centrales, j’ai cet amour pour les territoires qui au fil des siècles sont venus former notre belle France. Cette France que j’ai servi durant quelques années au sein des unités de l’Infanterie de Marine et par ce biais sur différents théâtres d’opérations et qui m’a donné ainsi une deuxième famille. Amoureux de notre Histoire mais surtout admirateur de l’œuvre de nos deux empereurs, loin de tous anachronismes, je défends leur mémoire mais aussi les valeurs qu’ils nous ont légué pour une certaine idée de la France grande, juste, respectée et généreuse. Cette Histoire, ces valeurs et cette mémoire qui doivent nous rendre fier d’être Français.