Les libertés que nous pouvons nous enorgueillir de posséder doivent toujours aller de pair avec les devoirs qui perdurent à notre charge.
Ainsi, notre liberté d’expression doit embrasser notre devoir de na pas dire et affirmer haut et fort des contrevérités.
Exercice parfois délicat je vous l’accorde, puisqu’il nous demande réflexion – parfois analyses – voire même étude du dossier à évoquer.
Dans un précédent papier[1], nous nous sommes évertués à remettre une bonne dose de vérité dans les faux procès que l’on intente gratuitement à Napoléon Bonaparte.
Aujourd’hui, je voudrais m’attarder quelque peu aux fabulations dont l’Empereur des Français est victime quant à sa soi-disant pensée esclavagiste, qui aurait conduite aux pires ignominies.
Balayons donc cette épaisse poussière de mensonges et nous y verrons plus clair.
1 – Une abolition pas si effective
Le monde du XVIIIe siècle n’est pas le même que celui du XXIe siècle ; encore faut-il le rappeler. A cette époque où la France rencontre l’un des plus grands chamboulements de son histoire, tous les continents du globe appliquent depuis bien longtemps déjà l’esclavage.
Après avoir tourné la page de la monarchie absolue en France, la Convention Nationale par son décret du 16 pluviôse an II (4 février 1794) abolit l’esclavage des « Nègres » sur une partie de ses colonies sans toutefois abolir la traite de ces derniers.
Le décret d’abolition ne s’applique cependant qu’aux « Nègres » et exclusivement à certaines colonies, comme évoqué ci-avant. Nous comprenons immédiatement que la métropole est exclue de son champs d’application.
Ne sont donc concernés par cette mesure que Saint-Domingue (Haïti aujourd’hui), la Guadeloupe et la Guyane (pour partie seulement). La Martinique quant à elle ne faisait pas partie du traité (puisque occupée par les Anglais) comme d’ailleurs les colonies en océan indien, à la Réunion, à l’Ile-Maurice ou encore aux Seychelles n’ont pas cessé l’esclavage, puisque les Colons n’ont pas souhaité appliquer la loi.
On le voit donc ici, l’abolition de l’esclavage n’a été réalisée qu’en partie par la « Première République française », légitimement influencée par les humanistes se revendiquant comme les héritiers des Lumières.
A cette époque, la France fait figure d’exception dans le monde dominé par des Nations appliquant très largement l’esclavage.
2 – Un rétablissement non désiré
Napoléon n’a jamais souhaité voir l’esclavage réintroduit là où il avait été aboli. Cela pourrait en étonner certains mais cela est bel et bien vrai.
Le futur Empereur des Français prononcera même ces mots : « Nous ne devons pas retirer la liberté à des hommes à qui nous l’avons donnée ».
Je tiendrais particulièrement à rappeler dans ce papier que Bonaparte à peine débarqué à Malte le 10 juin 1798 aura en deux jours, avec le concours de son armée, mis fin à 267 ans de domination de l’Ordre. Par décret du 28 prairial an VI (16 juin 1798) il y abolit l’esclavage dans ce pays. Une première décision de ce genre en Europe.
En 1807, devenu Empereur des Français quelques années auparavant, Napoléon abolira le servage dans le duché de Varsovie à peine crée.
Enfin, en 1815, la traite des Noirs sera totalement abolie en France par le même Napoléon.
Il est donc aisé de comprendre que Napoléon Bonaparte n’est pas le tyran esclavagiste que certains voudraient qu’il soit.
Comme nous l’avons évoqué dans les paragraphes précédents, le Premier Consul n’avait pas comme volonté de voir un rétablissement de l’esclavage ; cependant, certains hommes d’affaires puissants et influents ne l’entendaient pas de la même oreille. Cambacérès alors deuxième Consul, et Talleyrand en faisait notamment partie.
L’éphémère Traité d’Amiens acte sur le papier, et pour la première fois depuis le déclenchement de la Révolution française en 1789, la paix entre la France et l’Angleterre.
Dans une correspondance adressée par Napoléon pendant les négociations préliminaires, il écrira : « […] la continuation de la traite est envisagée jusqu’à ce que le gouvernement français aura pu trouver un accord avec le gouvernement britannique et d’autres gouvernements, pour supprimer la traite d’un commun accord […] »[2]
Napoléon n’étant pas un esclavagiste dans l’âme, a pourtant rétabli par la loi du 20 mai 1802 l’esclavage. Mais pour quelles raisons ?
3 – Les raisons du rétablissement de l’esclavage
Par le Traité d’Amiens, l’Angleterre rendit à la France l’ile de la Martinique subtilisée quelques années auparavant. Par voie de conséquence, l’esclavage n’avait jamais été abolit sur cette île.
Dans un premier temps, Napoléon a souhaité mettre à égalité l’ile avec la Guadeloupe[3].
Cependant son entourage politique ne fut pas du même avis, expliquant que la Martinique rencontrerait alors une crise socio-économique qui avait déjà lourdement affaibli la Guadeloupe.
L’égalité républicaine prônée notamment par le Conseil d’Etat, ne pouvait accepter des statuts différents ; Napoléon dû donc rétablir l’esclavage notamment en Guadeloupe afin d’éviter que la Martinique ne s’embrase et dans un but de maintien de l’Ordre public.
En sachant cela, nous sommes en droit de nous poser la question suivante, brillamment développée par le Général Michel Franceschi : Pourquoi accuser exclusivement Napoléon du rétablissement de l’esclavage en Guadeloupe et à Saint-Domingue, quand l’on sait que la Convention ne l’a aboli que partiellement en 1794 ? Que le monde entier, plus encore l’Angleterre, n’a jamais eu cette idée, et qu’il a fallu attendre 1848, soit 33 ans après la chute de l’Empire, et 27 ans après la mort de Napoléon, pour abolir complètement l’esclavage en France ?
Comment oser aujourd’hui penser que Napoléon Bonaparte eût été un esclavagiste, voire un raciste ? Lui qui dans sa jeunesse, déracinée se son ile Corse, a dû subir les moqueries de ses camarades Français quant à son accent chantant et sa faible connaissance de la langue du continent ? Lui qui créa le Code civil qui inspira le monde !
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Conclusion : Au lieu de toujours vouloir critiquer l’histoire avec nos yeux d’hommes et de femmes du XXIe siècle, sachons être pragmatiques et cessons ce besoin qu’ont certains d’être toujours dans la repentance.
Comme je l’ai déjà évoqué, ne prenons aucun raccourci historique et sachons comprendre la thématique dans son ensemble.
L’esclavage est aboli en France depuis 1848. Rappelons toutefois que selon l’Organisation internationale du Travail (OIT) l’esclavage contemporain touche plus de 40 millions de personnes à travers le monde.
Exploitation sexuelle et mariage forcé n’excluent en rien les femmes de cette horreur.
Que dire également des 150 millions d’enfants qui sont forcés de nos jours aux travaux les plus pénibles, les plus ingrats, ; quand ils ne deviennent pas pour certains pervers, l’objet de leur plaisir.
Christopher DESTAILLEURS-HENRY
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[1] https://francebonapartiste.fr/cachez-cette-histoire-que-je-ne-saurais-voir/
[2] « Histoire des négociations diplomatiques relatives aux traités de Morfontaine, Lunéville et d’Amiens » par Albert Du Casse – 1855.
[3] https://francebonapartiste.fr/napoleon-et-lesclavage-mise-au-point-historique/
Natif des terres parfumées de Provence, je suis depuis toujours un amoureux de la France, dans son ensemble et dans sa diversité. La richesse de nos paysages et la pluralité de nos coutumes n'ont de cesse de m'émerveiller mais me rappellent néanmoins l'unité de tout un peuple autour de la Nation, une et indivisible. Poussé par les principes d'égalité, de méritocratie, de respect ou encore d'autorité, je me suis orienté vers des études juridiques. Je me considère comme patriote, attaché à l'histoire de mon pays à la fois riche, glorieuse voire parfois tempétueuse.